Chuck Hull Le père méconnu de l'impression 3D
L'Américain a inventé un procédé d'impression d'objets par fines couches. Une invention qui date du début des années 1980 et qui révolutionne l'économie.
Au panthéon américain des inventeurs, le père de la stéréolithographie a sa place aux côtés des Thomas Edison, Steve Wozniak ou Henry Ford. En début d'année, Charles Hull - ses amis l'appellent « Chuck » - a été distingué par le National Inventor Hall of Fame. Sa technologie, rebaptisée « impression 3D » pour les besoins du marketing, est récemment devenue familière du grand public, qui peut en faire l'acquisition pour quelques centaines d'euros. A l'origine, sans qu'il le sache, Charles Hull est en compétition avec un trio de Français, dont le professeur Jean-Claude André de l'Ecole nationale supérieure des industries chimiques de Nancy qui dépose un brevet comparable. L'entreprise, qui le détient officiellement, oubliera toutefois d'en payer les frais et il sera perdu. Tout le contraire de Charles Hull, qui prend grand soin de la propriété industrielle. Il dépose sa demande le 8 août 1984 sous le titre : « appareil pour la production d'objets en trois dimensions par stéréolithographie ».
A l'époque, Hull travaillait chez un fabricant de lampes UV. Celles-ci sont utilisées dans l'industrie pour durcir des revêtements en polymère photosensible. « Mon objectif était de permettre aux ingénieurs de fabriquer rapidement des prototypes d'objets que l'on fabriquait d'ordinaire en plastique ce qui prenait des semaines », expliquait-il récemment dans un reportage de CNN. Son éclair de génie est de comprendre qu'en empilant des milliers de couches très fines de résine, il pouvait donner lentement forme à un objet en relief. Si son patron n'est pas intéressé, il autorise Charles Hull à travailler sur son projet à ses heures perdues. Mettant toute son énergie et même sa foi dans ses travaux, il parvient à fabriquer un premier objet en forme de petite coupe. « Ma femme a même appelé ça un calice », raconte-il. Lorsqu'il revient voir son patron, celui-ci refuse de reprendre le projet à son compte mais l'incite à créer son entreprise, 3DSystems et à travailler avec un des membres du conseil d'administration. Conseil qu'il suivit.
Toute l'industrie est séduite
Sa première machine est bien trop imposante pour des démonstrations. Qu'importe. Il fait des films qu'il envoie aux industriels. Les constructeurs automobiles en pleine débâcle face à la concurrence japonaise sont séduits, voyant dans la stéréolithographie un moyen d'innover plus rapidement. Charles Hull comprend vite que son invention n'est pas seulement confinée à la résine mais peut s'étendre à toutes sortes d'autres matériaux. C'est sans doute l'une des clefs du succès de 3DSystems, qui a gardé le contrôle de son marché, réalisant l'an dernier un chiffre d'affaires de 513 millions de dollars en progression de 45 %. Pendant des années, ces machines de prototypage rapide restent destinées aux bureaux d'études ou à des applications extrêmement coûteuses. Aux écuries de Formule 1, par exemple, où les ingénieurs modifient l'aérodynamique des voitures d'un Grand Prix à l'autre. Désormais, elles séduisent toute l'industrie surtout pour produire des pièces en très faible quantité, voire à l'unité. « Ce sont les applications autour de la santé qui m'ont le plus étonné », explique Charles Hull, soixante-quinze ans, la moustache blanche, plus que jamais figure de proue de son entreprise.